Sur le blog, je parle assez peu des stratégies boursières orientées dividende. Cependant, avec la chute de la bourse, le rendement des actions devient de plus en plus attractif. Dans cet article, je vais m’intéresser à la société Total, pilier du CAC 40. Avec un rendement proche des 10%, est-ce une bonne affaire ?
Total, le poids lourd du CAC 40
En tant que major pétrolière intégrée, Total (EPA: FP) intervient sur tous les segments :
- L’Exploration et la Production de pétrole et de Gaz,
- La Transformation et la Valorisation du pétrole brute,
- Le Transport et la Distribution.
Mais depuis quelques années, Total investit de plus en plus dans des projets d’énergies renouvelables (solaires, bioénergies).
Le groupe pétrolier a longtemps fait parti des premières capitalisations boursières françaises. Aujourd’hui, l’entreprise pèse pour plus de 5% du CAC 40. Le premier actionnaire de Total n’est autre que BlackRock (6%), suivi par les salariés (5%).
Tout savoir sur le dividende de Total
Total est une société mature, son principal atout pour les investisseurs réside dans son dividende.
Un rare dividende trimestriel
Total fait parti des rares entreprises françaises qui distribuent un dividende trimestriel. En effet, Total détache trois acomptes au cours de l’année.
- Septembre
- Janvier
- Mars
Coupon | Montant | Date de détachement | Date de paiement |
1er acompte | 0,66€ / action | 25 septembre 2020 | 2 octobre 2020 |
2e acompte | 0,66€ / action | 4 janvier 2021 | 11 janvier 2021 |
3e acompte | 0,66€ / action | 25 mars 2021 | 1er avril 2021 |
Solde | 24 juin 2021 |
Le deuxième acompte du dividende sera versé au mois de janvier 2021. Pour toucher le dividende (acompte / solde) de Total, vous devez être actionnaire la veille de son détachement. Par exemple, pour toucher le troisième acompte, vous devez être actionnaire le 24 mars 2021. Votre compte espèce sera crédité le 1er avril 2021.
Un dividende croissant à long terme
Toucher des dividendes régulièrement est une sensation grisante. Alors que vous êtes au travail, en vacances, ou faites n’importe quelle activité, vous touchez de l’argent. Mais il faut faire attention à bien sélectionner les actions que vous achetez. Beaucoup de débutants sont tentés par les hauts rendements, sans imaginer que si le rendement est élevé, c’est tout simplement parce que le cours s’est écroulé.
Ainsi, le premier critère à regarder avant d’investir est la soutenabilité du dividende pour l’entreprise. Pour cela, il convient de s’assurer que l’entreprise augmente régulièrement le montant de son dividende.
Sur son site internet, Total annonce que le dividende est stable ou en progression depuis plus de 35 ans. Entre 2009 et 2019, le dividende versé par la major pétrolière a augmenté de 5,6% ! C’est plutôt pas mal dans un contexte de taux bas et de faible inflation…
Un rendement historiquement élevé
Actuellement le dividende de Total affiche un rendement supérieur à 10%. Est-ce normal pour Total ? Quand on regarde l’historique de l’entreprise, ces dernières années le rendement moyen était plutôt aux alentours de 5-6%.
Un dividende croissant et élevé est le saint graal de tout investisseur boursier. Mais avant d’investir aveuglément, il convient de s’assurer que ce rendement est pérenne.
Krach pétrolier : quels impacts sur le dividende de Total ?
Les résultats et donc le dividende de Total sont intiment liés au cours du pétrole. Cependant, grâce à sa diversification dans les métiers en avals (transports, raffinage, commercialisation), Total peut amortir une baisse du prix du baril.
Le pétrole à moins de 30 dollars ?
Au cours des 20 dernières années, le cours du pétrole a connu deux krach majeurs. Tout d’abord, son cours s’est effondré au plus fort du krach boursier de 2008 jusqu’à atteindre le seuil des 32 dollars le barils.
Sur la période 2014-2016, le prix du pétrole s’est également écroulé pour atteindre le support long terme autour des 30 dollars par barils.
Mais comme on a pu le voir précédemment, le dividende de Total a continué de croitre malgré la faiblesse du prix du baril.
Sensibilité de Total au cours du pétrole
Aujourd’hui, le point mort (prix à partir duquel Total gagne de l’argent) est d’environ 25 dollars par barils. Si le prix du baril est supérieur à 25 dollars, Total fera des bénéfices mais seront-ils suffisants pour couvrir le paiement du dividende ?
L’activité de Total a généré un flux de trésorerie de 24 milliards en 2019. Mais avec une baisse du baril de 20 dollars, ce flux de trésorerie pourrait être amputé de 6,6 milliards, soit le montant versé aux actionnaires en 2019.
Dans ces conditions de marchés, le maintien du dividende de Total semble compromis. Mais Total conserve quelques atouts pour faire face à ce krach.
Regardons le précédent krach pétrolier
À partir de 2014, le prix du baril de pétrole a chuté sévèrement, atteignant un point bas à 30$ en janvier/février 2016. À cette époque la banque d’affaires Goldman Sachs voyait même le pétrole toucher les 20$…
Ce krach a été provoqué par plusieurs facteurs :
- ralentissement de la croissance chinoise (et notamment un krach boursier en 2015),
- abondance d’offre grâce au pétrole de schiste américain,
- retour des exportations pétrolières de l’Iran.
Cependant, on peut constater que le cours du pétrole a rebondit assez vite. Le prix du WTI a doublé en l’espace de 24 mois.
En effet pendant un krach pétrolier, de nombreuses entreprises pétrolières font faillite. Le coût d’extraction du pétrole étant supérieur au prix du baril, les entreprises grillent rapidement leur trésorerie jusqu’à la cessation de paiement et la faillite.
Par exemple en 2015, le pétrole de schiste américain coutait entre 65 et 70$ par baril. Beaucoup de producteurs très endettés ont mis la clé sous la porte.
Comment Total a traversé ce krach pétrolier ?
Pour traverser cette tempête, Total a nettement réduit ses investissements. Dans son document de référence 2016, on constate facilement que Total a compensé la baisse de son flux de trésorerie d’exploitation par une baisse de son flux de trésorerie d’investissement.
Par ailleurs, Total a mis en place une option de paiement du dividende en actions. Les actionnaires pouvaient ainsi être rémunérés soit en numéraire (cash), soit en actions. Pendant cette période, la majorité des actionnaires a choisi d’être rémunéré en actions, ils bénéficiaient d’une décote sur le prix de l’action.
Investir sur Total, c’est parier sur le cours du pétrole
Au jour d’aujourd’hui, le point mort de Total couvrant le dividende est inférieur à 50$ le baril. En dessous de ce seuil, la trésorerie d’exploitation ne permet pas de couvrir le dividende, Total est donc dans l’obligation de s’endetter ou de rogner sur ses investissements pour couvrir son coupon.
Acheter l’action Total revient donc à parier sur une augmentation du prix du baril dans les prochains mois. Si le cours du pétrole reste durablement (> 12 mois) en deçà de 50$ le baril, le dividende sera en danger.
Quel sera l’impact du Coronavirus sur la demande de pétrole ? Les mesures de confinement adoptées par de nombreux gouvernements vont peser sur la consommation de pétrole. Un ralentissement de la croissance, voir même une récession ferait également chuter la demande d’or noir.
Il n’y a pas que les dividendes qui comptent !
Le dividende est une composante importante du rendement mais ce n’est pas la seule chose qui compte. Le cours de Total a chuté violemment, perdant 50% de sa valeur en quelques semaines. Imaginez un peu, on parle quand même de l’une des premières entreprises de France, qui est rentable et peu endettée !
Au prix de 25€, l’action se négocie au même tarif qu’en 1999. Lors de la bulle internet et lors de la crise des subprimes, le cours de Total n’est jamais descendu aussi bas… L’entreprise pourrait même en profiter pour racheter ses actions, dans le but de les annuler (effet relutif).
Bon il est peu probable que Total le fasse. Rachats d’actions et versement du coupon pèseraient trop lourd sur les finances du groupe. D’autant plus que Total a mis en place un programme de rachats d’actions, pour 2 milliards $, si le prix du baril est supérieur ou égal à 60$.
Maintenant, imaginons que Total réduise ou coupe son dividende. L’investisseur devrait probablement faire le dos rond, en attendant que le prix du baril remonte. Le prix de l’or noir ne peut pas rester indéfiniment bas (mécanisme d’offre et demande). Et à ce moment là, l’investisseur ferait une très belle plus-value en capital.
Disclaimer : je possède une petite position acheteuse sur Total (initié mi-mars). Pour le moment, je ne compte pas renforcer mes achats sur le titre (ni le vendre).
Alexandre
M’est avis qu’il n’y a pas à se préciter car la baisse à encore de beau jour devant elle.
Et que le seul indicateur pertinent à surveiller ces temps ci est la courbe des décès imputables au coronavirus. Car tant qu’elle ne s’aplatit pas (ou qu’une annonce de traitement ou vaccin crédible permet de l’espérer)… point de salut pour l’économie mondiale. Donc pour le pétrole. D’autant qu’il faut attendre aussi les décès de pétrolières US « schisteuses » engendrées par la stratégie poutinienne. Donc, sauf conflit du côté d’Ormuz ou soudaines embrassades russo-séoudienne… une oreille je ne bougerai point, mais en embuscade l’oeil vigilant, resterai !
Cette guerre va faire beaucoup de dégâts dans les pétromonarchies, qui achètent la paix sociale à coup de pétrodollars.
En tout cas, la Russie vient d’ouvrir la porte à de nouvelles négociations.
Total a les reins solides pour tenir au moins 12 mois (sans couper le dividende).
D’ailleurs son PDG vient d’annoncer un plan d’économie de plusieurs milliards, sans remettre en question le versement du dividende.
A propos des dividendes en croissance constante, que penses-tu Alexandre de l’etf: SEL Lyxor STOXX Europe Select Dividend 30 UCITS ETF code LU1812092168
Bonjour Laurent,
Je ne suis pas un très grand fan des ETF distribuants. Sur ETF, il est assez difficile d’anticiper le montant du dividende qui sera versé.
D’ailleurs sur cet ETF, je n’ai pas trouvé l’historique des versements ni le rendement…
Par ailleurs, cet ETF est très investi sur le secteur financier (40% de l’actif) et à la marge sur le pétrole.
Pour mémoire, au début de la crise, la BCE avait demandé aux banques de ne pas verser de dividende.
Si je devais générer une rentre à travers les dividendes, je choisirais des actions individuelles. Entreprise leader, bien gérée et solide financièrement qui distribue un dividende croissant. Malheureusement ces actions sont chères et offrent des rendements de 1,5 ou 2% aujourd’hui.
Alexandre
merci pour ton avis éclairé Alexandre. En direct j’ai actuellement du schneider, peugeot, michelin, lvmh, amundi, vinci, total, bouygues et air liquide.
le prix du baril est bien incertain compte tenu de la crise………..mais je pense que le pétrole à encore de beaux jours
Hello Revil,
Je suis d’accord avec vous. On n’est pas près à remplacer le pétrole (transport, plastique, etc.)
Alexandre
Merci pour cet article très complet sur l'action Total Alexandre !
J'y vois un peu plus clair sur cette entreprise notamment concernant le point mort de Total et le prix du baril.
Les nombreux graphiques aident également à bien comprendre tes propos 🙂
Personnellement, je trouve que Total s'en sort très bien sur les dividendes et est une des rares entreprises françaises à en distribuer en hausse sur une si longue période.
Il est vrai qu'avec 2020 cependant, Total a subit un gros déficit sur l'année et a donc du s'endetter plus fortement pour maintenir son dividende de l'année 2021.